La voix de la Butte par TPE Mag

par François Colombier sur le e-magazine TPE Mag

Sa voix enfle, résonne, tourbillonne, rebondit dans les rues et ruelles de Montmartre. Soudain, les mots et l’esprit de Piaf, Brel, Aznavour, Dalida, ressurgissent du passé, revivent dans les pensées. Sous l’indispensable casquette Gavroche, les yeux d’Anne-Sophie Guerrier pétillent du plaisir d’entraîner avec elle son public.

Cela fait un an que la jeune chanteuse propose une visite du quartier de Montmartre en chansons. Paroles et musiques, anecdotes qui rythment le parcours, racontant la vie des artistes, l’histoire des lieux, accompagnées, pendant les deux heures de déambulation poétique, de compositions immortelles et intemporelles, ces chansons françaises réalistes qui font partie du patrimoine du quartier.
Il faut entendre les bruits de la rue qui se taisent au fur et à mesure que sa voix enfle quand elle lance les refrains les plus prenants de « L’hymne à l’amour » ou de « Quand on n’a que l’amour », il faut voir les sourires ou les larmes qui se glissent sur le visage de son auditoire, des groupes d’une quinzaine de personnes, entraînés par les mélodies et la tessiture de l’artiste. Des familles fêtant les 80 ans de la grand-mère, des touristes hollandais découvrant Paris sous un autre jour, des comités d’entreprise, des amoureux, des curieux, des amis pour un enterrement de vie de jeune fille, c’est un public souvent varié, mais toujours conquis, qui lui emboîte le pas.

JOIE DE VIVRE

Bien qu’elle ait suivi les cours d’une école de commerce parisienne, la passion de l’art, de la chanson, n’a jamais quitté Anne-Sophie. Master en poche, au lieu de se plonger dans les offres d’emploi, elle a passé un autre concours, l’audition très sélective des chanteurs de métro. De quoi apprendre les bases du métier, tout en continuant à se perfectionner auprès d’un maître de chant très réputé, Éric Tavelli. « On travaille sur les détails qui permettent de passer à un niveau supérieur, de proposer de la qualité. Je ne me contente pas de ce que je fais. Je veux être meilleure », affirme Anne-Sophie. Entre les grèves, les manifestations, le Covid, il devenait impossible de se produire dans les couloirs du métro. Alors, amoureuse de son quartier de Montmartre, elle a construit son idée, recherché des anecdotes, les petites et grandes histoires, élaboré un circuit, sélectionné son répertoire. Elle s’était déjà fait remarquer de ses voisins en chantant de son balcon, drapée dans une magnifique robe rouge, les soirs de fête de la musique ou des vendanges. Il s’agissait alors de transformer l’essai, dans la rue.

« Ce quartier est un vrai village. Tout le monde se connaît, s’entraide. On n’est pas vraiment à Paris », constate-t-elle. Elle le réalise à chacune de ses représentations, avec l’accueil enthousiaste des habitants, des commerçants, et si quelques bobos râlent, on ne fait pas attention à eux.

Quelques échos médiatiques positifs ont vite donné de l’ampleur à son projet. Les dates se sont remplies, les groupes se sont succédé, l’artiste elle-même a pris confiance en elle, sur le chant, mais aussi sur la façon de faire vivre ses spectacles, jouant avec les spectateurs, créant une ambiance douce et magique, conviviale et interactive. « Il y a toujours un esprit particulier, une bonne humeur, une joie de vivre. Des gens reviennent plusieurs fois », se réjouit Anne-Sophie.

Ses visites montmartroises pavent la route d’une carrière qu’elle voudrait poursuivre sur la scène, enfilant alors son costume d’auteur-mélodiste-interprète, dans un univers de chansons réalistes, de caractère, le registre indémodable des chansons qui parlent au cœur. Elle ira peut-être aussi vers d’autres quartiers de Paris, Belleville, Saint-Germain-des-Prés… L’aventure ne fait que commencer.

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